mercredi 27 mars 2013

L’intervention française au Mali

22 mars 2013; anniversaire du coup d’Etat du Capitaine Sanogo…enfin si l’on peut célébrer de tels évènements.
Déjà un an que l’économie du pays tourne au ralenti. Déjà un an que des milliers de maliens vivent dans des camps de réfugiés au Niger, au Burkina Faso et en Mauritanie. Déjà un an que la situation humanitaire au Nord du pays est alarmante. Déjà un an que le Mali est au coeur de l’actualité et que les yeux du monde oscillent entre le drame syrien et le conflit idéologique au Nord du Mali.

Car il s’agit bien là d’un conflit idéologique. D’un côté nous avons différentes organisations se revendiquant de l’Islam prétendant défendre des lois divines, et de l’autre nous avons le Gouvernement Malien et ses alliés africains et occidentaux soucieux de limiter l’expansion de l’extrêmisme religieux et du terrorisme en Afrique de l’Ouest (et dans le continent d’une manière générale). 

De retour au Mali après plusieurs mois en République Centrafricaine (pays sous extreme tension actuellement qui mériterait un peu plus d’attention médiatique) je ne peut que constater un changement dans les rues de Bamako, visuel: la France est élevée au rang de sauveur du pays.

En effet, pendant mon absence la crise malienne a pris un tournant. L’intervention militaire française enclenchée le 11 janvier 2013 et la libération rapide des villes clefs par les troupes ont rendu la France trés populaire au Mali.
Pas besoin d’attendre bien longtemps pour s’en appercevoir: les avions des forces armées françaises sur le tarmac de l’aéroport international de Bamako Sénou et la présence de blancs en short et rangers plantent de suite le décor: le Mali est en guerre.
Et c’est la France, Ô sauveur du peuple du pétrole et du gaz malien qui intervient!

Une fois dans les rues de la capitale, on est vite frappé par le nombre de drapeaux français: sur les Sotrama (transport en commun), les boutiques, les motos, les bâtiments, etc. Il y en a partout! On croirait une célébration du 14 juillet!
Il y a meme des clips musicaux à la gloire de la France…ou comment l’ancien colon autrefois rejeté devient le messi en un claquement de canon doigt:


[ Cette intervention est pourtant d’un genre à part, puisqu’elle se caractérise par une absence criante de couverture médiatique dans les zones de combat. Les seules images diffusées sont celles de journalistes encadrés par l’armée française, filtrées donc (lire à ce propos l’article de l’association SURVIE).
Cette guerre est donc l’une des premières guerres modernes non couvertes par les médias…pourquoi?

“Peur” des journalistes? Difficultés d’accés? Des journalistes ont couvert tous les grands conflits – Vietnam, Yougoslavie, Irak, Syrie, etc – pourquoi pas le Mali?

La question reste ouverte, mais cet état de fait profite inévitablement aux armées combatants sur place et limite les risques de scandales. Car une guerre touche inévitablement des civils, quoi qu’on en dise.  Il y a, ou aura donc, des scandales, des bavures.
L’ONG Amnesty International a ainsi déjà tiré la sonnette d’alarme suite aux dérapages de certains soldats maliens, brutalisant des civils sous prétexte de leur appartenance ethnique (touaregs).

Le risque indéniable de ce conflit est en effet de voir des catégories entières de population stigmatisées, les raccourcis ‘touaregs et/ou africains à peau claire = rebelles’ sont déjà une réalité.
Eccueil malheureux dans lequel nous tombons régulièrement suite aux chocs et conflits ouverts[1]. Il faut des boucs émissaires, extérioriser les frustrations émotionnelles, et il est humain de vouloir se venger.
Toutefois il est également nécessaire que des instruments de contre-pouvoir – les medias - soit en mesure de dénoncer de telles dérives, afin de les canaliser. ]

En attendant, l’ambiance à Bamako reste sereine…et si nous avions des oeillères nous pourrions à peine nous rendre compte que nous nous trouvons dans un pays en guerre!
Le quotidien prends le dessus, les gens vaquent à leurs occupations, les embouteillages sont toujours là, la saison sèche nous fait transpirer et les dimanches à Bamako sont toujours jours de mariage…




[1] Bah oui, les français se sont bien dit suite au 11 septembre que : ‘musulman = extremiste’ ou encore plus fun : ‘arabe = musulmans terroriste’.
QUOI les conflits ethniques ne seraient pas réservés à l’Afrique ? On m’aurait menti ?